Pyrénées FM La radio des vallées
REPORTAGE. Dans les Pyrénées-Orientales, les éleveurs catalans ont été les premiers à être confrontés à une crise sanitaire majeure causée par le sérotype 8 de la fièvre catarrhale ovine (FCO 8). Cette épizootie, apparue dès le mois de juin 2024, a décimé les troupeaux, notamment dans le Vallespir. En plus des pertes massives de bétail, les éleveurs ont dû affronter des retards dans le service d’équarrissage, se retrouvant contraints de supporter des cadavres en décomposition pendant plusieurs jours. Récit d’une crise éprouvante avec ceux qui ont été les premiers touchés.
Disons-le tout de suite, le paysage à couper le souffle que nous offre notre point de rendez-vous avec Thomas Ribes, éleveur bovin affecté par la FCO 8, nous a fait oublier en une fraction de seconde que les Pyrénées-Orientales n’ont rien d’une terre d’élevage : concurrence historique d’autres départements, climat méditerranéen, terrains accidentés, ne sont que quelques-uns des éléments qui expliquent ce constat répandu.
Ici, au cœur des Pyrénées, à Prats-de-Mollo-la-Preste, dans le Haut-Vallespir, pas un bruit ne vient perturber les 45 vaches Aubrac et les taureaux Charolais de cet éleveur de 34 ans qui a repris l’exploitation familiale il y a maintenant sept ans. Sans surprise, dès 08 heures, à la fin août, le soleil réchauffe ces messieurs-dames qui s’affairent à pâturer au milieu des sommets pyrénéens. Un confort qui s’accompagne d’une vue dégagée sur la vallée, et à laquelle ces gros ruminants semblent totalement indifférents. Nous en viendrions presque à les envier, jusqu’à ce que notre interlocuteur nous ramène à la raison de notre présence ici :
« Nous avons été parmi les premiers touchés par des cas de FCO 8. Au départ, ils sont apparus dans la région du Vallespir, puis la situation s'est étendue à tout le département à partir de la mi-juin. Les premiers signes cliniques sont apparus chez les vaches et les brebis, et ces dernières mouraient en seulement deux jours. Tout le monde dans le Vallespir a commencé à s'inquiéter et à diffuser l'information. (…) On pensait que c'était une autre maladie ou quelque chose de différent. Par exemple, pour l'une de mes vaches, j'ai d'abord cru qu'elle avait avalé un corps étranger », se remémore l’éleveur viande, qui est aussi le président du syndicat agricole du Haut-Vallespir.
Autour de nous, le paysage semble soudainement moins éclatant. Il faut dire qu’en y regardant de plus près, ces terres sont décidément très sèches. La faute à des températures élevées et à une pluviométrie trop faible qui ont fait du Pays Catalan le « département le plus sec de France. »Une information cruciale qui a des conséquences sur les élevages du territoire : les bêtes sont envoyées en estive pour pâturer (là où les températures sont plus fraîches et l’herbe plus verte), ou à défaut, elles restent en plaine et cela contraint leurs propriétaires à se procurer de la nourriture par d’autres moyens, une perte de temps et d’argent.
Aussi, le territoire a fait l’objet de nombreuses pertes après une épidémie bovine de Maladie Hémorragique Épizootique (MHE) en 2023, des animaux qu’il a fallu remplacer pour garantir la rentabilité du troupeau. Alors ici, le nouveau variant de la FCO 8 signalé à l’automne 2023 au nord de l’Occitanie, au milieu de tous ces problèmes, personne n’y a vraiment prêté attention.
« On savait que la région de l’Aveyron avait été touchée l’année dernière, mais on ne s'attendait pas à ce que ça arrive aussi vite et de manière aussi fulgurante ici. […] Ce week-end-là, ça a été une véritable hécatombe, tout le monde avait des cas. C'est comme ça qu'on a pris conscience de l'ampleur du problème. C'était vraiment sérieux. Même les vétérinaires du secteur (Boulou, Albères) ont été submergés d'appels », raconte le président du syndicat agricole du Vallespir.
Le week-end du 15 et 16 juin 2024, Thomas Ribes s’en souvient parfaitement. Les notifications WhatsApp sur le groupe des éleveurs du coin ont été incessantes : « On n’a pas dormi, c’était vraiment la panique générale. Personne ne s’attendait à ce que ce soit aussi violent. La mortalité chez les brebis a été terrible. »
La maladie de la langue bleue s’est répandue comme une traînée de poudre, poussée par des moucherons de type culicoïdes qui ont piqué de bêtes en bêtes et d’élevages en élevages sans que personne ne les soupçonne au départ. La conséquence, c’est que toutes espèces de ruminants confondues, plus de 90 % des troupeaux du Vallespir ont été atteints, avec un taux de mortalité compris entre 30 et 75 % chez les ovins. Autant dire que les dégâts ont été constatés rapidement.
Dans le Haut-Vallespir, celle qui a donné l’alerte cette semaine-là, c’est Orphée Chrysostome. Elle est éleveuse mixte à Corsavy (66), ce qui signifie qu’elle détient des brebis laitières et des brebis destinées à la reproduction pour donner naissance à des agneaux qui seront consommés par l’Homme. Un héritage familial datant de 1988. En juin 2024, son cheptel était composé de 440 ovins viande, restés à la bergerie, et de 143 brebis laitières, autorisées à se mouvoir librement entre l’estive et la bergerie. Si Orphée a bien constaté que des bêtes revenaient le ventre couvert de piqûres, elle ne s’en est pas inquiétée immédiatement, car le phénomène n’est pas rare d’après elle.
« Sur les 143 brebis laitières, un tiers a été infecté dès la première semaine. Ce qui nous a vraiment étonnés, c'est que ça a touché les brebis les plus belles, les plus productrices, et les plus grosses, celles qui faisaient 80 kg. Elles sont mortes en trois jours et on ne pouvait rien faire. […] Dix jours après, c'était au tour des brebis à viande d’être touchées alors qu’on les pensait protégées parce qu’elles sont moins productives », raconte l’éleveuse, désabusée, au micro de Pyrénées FM.
Jérôme Vergès, ancien maçon reconverti dans l’élevage d’ovins viande après la crise du Covid-19, ne se doutait de rien lui non plus. Il se rappelle précisément du 12 juin, date à laquelle il a constaté qu’une de ses 160 brebis blanches du Massif Central était « étrange, ses lèvres tremblaient et elle semblait avoir de la fièvre. Je pensais qu’elle avait mangé quelque chose de mauvais », détaille-t-il, perplexe. La méconnaissance que les éleveurs du Vallespir ont au sujet de la FCO 8 au début de la pandémie, et qu’ils reconnaissent humblement, saute aux yeux. Il faut dire que le sérotype 8 de la fièvre catarrhale ovine avait disparu du territoire depuis la première crise sanitaire de 2007.
De son nouveau départ à Saint-Laurent-de-Cerdans, dans lequel il a investi toutes ses économies dans l’espoir de vivre de sa passion et de subvenir aux besoins de sa famille (depuis peu composée d’un nouveau-né), il ne reste qu’un élevage affaibli et amputé d’une partie de ses membres.
« Nous avons perdu beaucoup de bêtes : souvent, une brebis malade mourait le lendemain après avoir été mise à l’écart. Il m'est arrivé de transporter 7 ou 8 bêtes malades avec la bétaillère, et le lendemain, il y en avait quatre mortes. En 10 à 15 jours, nous avons perdu presque 40 bêtes. »
Au 31 août, le nombre de brebis décédées dans sa bergerie a dépassé les 40 % du total de son cheptel, soit 56 pertes, dont 52 mères. Autant d’animaux qui ne feront pas d’agneaux destinés à être vendus. Un premier bilan auquel il faut ajouter les femelles qui ont avorté, et celles, soignées ou sans symptômes apparents, qui se révéleront infertiles dans quelques mois. Outre la mort, l’infertilité est une des conséquences de la maladie les plus craintes car elle touche aussi bien les éleveurs ovins, que bovins. Elle est aussi à l’origine d’une méfiance vis-à-vis des vaccins.
Car les vaccins disponibles en vente libre depuis des années ne sont pas recommandés lorsque les bêtes sont pleines : ils pourraient favoriser les avortements. Et cela, dans le petit monde de l’élevage, tout le monde le sait. À l’inverse, au début de l’été, les éleveurs ne savent pas quoi penser d’un variant de la FCO 8 pour lequel les communautés scientifiques et agricoles n’ont que quelques mois de recul. Alors, en tenant compte d’autres facteurs, le choix a vite été fait : la vaccination, ça a été non.
« Dans le département, on était au courant, il y avait des réunions où on nous avait informés, en nous demandant si certains souhaitaient vacciner. Mais nous, on pensait que c'était loin, qu'on ne serait pas touchés. Et puis, il faut dire que le vaccin a un coût. Donc, tant qu’on n’était pas concernés, on ne pensait pas que ça nous arriverait », justifie Thomas Ribes, éleveur ovin et président du syndicat agricole du Haut-Vallespir.
En l’absence de vaccins, les éleveurs se sont passés le mot et ont testé différents traitements pour tenter de soulager leurs bêtes malades, et éventuellement, pour stopper l’épidémie. Parmi lesquels l’aspirine : « On a une pompe doseuse pour l’eau dans la bergerie, et on a mis de l’aspirine dedans. On y a mélangé des anti-inflammatoires. On a vidé les pharmacies locales. Il fallait trouver un remède pour faire diminuer la fièvre, et on a eu l’impression que cela fonctionnait », raconte Orphée Chrysostome face à notre regard médusé. « Ce n’était pas miraculeux, mais on a vraiment eu l’impression que l’aspirine, combinée à d’autres traitements, les as soulagées » tente-t-elle de nous faire comprendre, en ajoutant que d’autres éleveurs se sont essayés à l’homéopathie.
Un manque de moyens et d’informations qui se ressent aussi dans leurs tentatives d’éloigner les moucherons culicoïdes, qu’ils ont appris responsable de la transmission de la maladie. Orphée a par exemple fait usage d’huiles essentielles, les insecticides occasionnant des dommages aux apiculteurs. Rapidement, face aux centaines de piqûres recensées sur le ventre des bêtes décédées, quelques éleveurs du Vallespir ont fait appel à un professionnel spécialisé dans le piégeage de moucherons, qui leur a confirmé une surpopulation de ce fameux vecteur de la maladie, a priori du fait de températures idéales en montagne en période de fortes chaleurs. Autant de tentatives vaines qui sont le reflet d’une grande détresse.
« Cependant, les brebis continuaient à mourir » constate Jérôme, qui n’a pas vraiment cru que ces essais seraient concluants. Alors, malgré des approches différentes concernant le vaccin, les éleveurs catalans ont fini par s’entendre sur la nécessité de vacciner leurs troupeaux.
« C'était la seule option qui pouvait nous sauver. Nous souhaitions surtout protéger les bêtes qui restaient, en sachant que le vaccin nécessitait 42 jours pour être efficace. Nous n'avions jamais imaginé qu'après ces 42 jours, il nous manquerait plus de 30 % du troupeau », raconte-t-il non sans effroi, et poursuit : « tous les doutes que nous avions sur le vaccin n'ont rien changé aux pertes finales. On avait peur que les brebis avortent, mais elles meurent ! Donc que les brebis avortent ou non, cela ne change rien une fois qu'elles sont mortes. »
Odile Arnaudies, vétérinaire basée au Boulou (66) et dont la patientèle est composée à 20 % de ruminants, se rappellera pendant longtemps de ces semaines interminables où elle a tenté de prendre le dessus sur l’épizootie.
« Nous avons organisé la vaccination dans un contexte défavorable puisque les animaux étaient déjà malades. C’était le seul moyen, et en tant que vétérinaire, je ne pouvais simplement pas dire aux éleveurs d’attendre sans rien faire. Ils avaient besoin de prendre des mesures actives pour faire face à cette crise, et je les comprends tout à fait. [...] Nous avons donc utilisé les moyens dont nous disposions au moment de la crise. Dans notre cas, nous avons dû organiser une vaccination en urgence avec les vaccins disponibles. Les mises sur le marché se sont faites de manière échelonnée, en fonction des différents laboratoires, et il semble qu'il y ait des variations dans l’impact de la vaccination selon le laboratoire utilisé. Bien sûr, nous aurions préféré vacciner tranquillement cet hiver, dans les bergeries, avec une bonne surveillance. Si nous avions su, nous aurions anticipé », nous raconte-t-elle avec un sentiment de culpabilité bien perceptible.
Pourtant dans le Haut-Vallespir, tous les éleveurs que nous avons rencontrés nous ont affirmés que cette professionnelle de la santé animale, qui dit ne pas être une spécialiste du rural, a fait de son mieux. Au même titre que ses clients, Odile Arnaudies semble ressortir de cette crise sanitaire aussi humble que marquée.
Bien que laissant apparaître sa satisfaction concernant la manifestation d’un élan de solidarité dans la vallée, la vétérinaire du Boulou confirme d’un timide mouvement de tête qu’elle a été affectée par l’acharnement continu qu’elle a déployé au cours de ces deux mois de crise, et qui n’a abouti qu’à un sentiment de déception latent.
« Au début, nous nous sommes dit que la FCO arrivait, mais nous allions y faire face car nos bêtes sont robustes et que nous prenons bien soin d'elles. Finalement [...] nous avons eu des cas pendant plus de deux mois avec de nombreux animaux qui sont morts. [...] Ce qui est difficile, ce sont ces appels téléphoniques ou ces textos que je reçois, où l’on me dit : "Hier, elle est morte, j'ai fait cela et cela, que puis-je faire ?" Malheureusement, je n’ai pas toutes les réponses et, malgré mes conseils, nous faisons face à de nombreux échecs. Nous avons dû faire face à cet échec trop souvent », dépeint notre interlocutrice, encore affectée.
Cette impuissance face à une situation qui leur échappe à mesure que les cadavres s’accumulent, tous les éleveurs des Pyrénées qui traversent cette crise la connaissent, qu’ils soient situés dans les Pyrénées-Orientales, dans l’Aude, en Ariège, en Haute-Garonne et dans les Hautes-Pyrénées.
En Pays Catalan, Jérôme Vergès, jeune papa, a tenté de rendre son expérience de terrain utile à d’autres, en vain.
« Il fallait se raccrocher à quelque chose, alors j'ai rejoint un groupe [...] FCO qui s’est formé dans la région. Nous essayions de prévenir [...] une vallée voisine où la situation n'était pas encore aussi grave. Certains proposaient de traiter les animaux avec des huiles essentielles ou d'autres remèdes. Nous leur disions : "vous n’aurez pas le temps, ça tombe ici comme des mouches !", mais ils ne semblaient pas prendre la situation au sérieux, alors j'ai décidé de quitter le groupe », nous raconte l’éleveur ovin viande, qui a été particulièrement affecté par cet épisode, vécu comme un échec supplémentaire.
D’autant plus que d’après plusieurs membres de ce groupe WhatsApp qui comptait au moins une centaine de membres, les éleveurs de la région n’ont pas été tendres entre eux. Certains, pas encore frappés par la fièvre catarrhale ovine, rejetant la responsabilité de la crise régionale qui se dessinait sur les agriculteurs du 66. Des comportements dilatoires typiques lorsqu’une crise sanitaire survient, selon un éleveur ariégeois interrogé par téléphone, qui s’ajoutent au sentiment d’impuissance induit par la vision de la souffrance des brebis.
« Vous savez, certaines de ces brebis, nous les avons élevées au biberon, donc elles nous suivaient et nous connaissaient bien. Un jour, j’ai craqué. J'ai dû rentrer une brebis malade, celle qui m’appelait chaque fois que je passais devant elle. C’est bête, mais ce sont des choses qui vous marquent profondément. Elle était allongée au fond, incapable de se lever, de manger ou de boire. Nous n'avons pas pu sauver cette brebis, et elle a beaucoup souffert. Sa voix a diminué de jour en jour jusqu'à sa mort », témoigne Jérôme, les yeux humides.
La voix tremblante et le regard chargé de souvenirs qu’elle cherche encore à éviter, Orphée Chrysostome confirme cet attachement aux bêtes, y compris en élevage destiné à la consommation humaine. Certaines sont d’ailleurs épargnées alors qu’elles représentent un coût pour l’exploitation, ce sont les « chouchous », dit-elle en nous les présentant fièrement.
« Nos brebis, on peut dire ce qu'on veut, on emmène les agneaux à l'abattoir, mais elles vivent quasiment 10 ans avec nous. C'est sentimental. Certaines personnes ont des animaux de compagnie, nous, ce sont nos brebis. Ce n'est pas parce qu'elles partent à l'abattoir que cela change ce qu'on ressent. On les voit naître, on s'en occupe, elles passent 10 ans avec nous. C'est dur de voir tout le travail investi et que finalement, en 3 jours, tout s'effondre. Heureusement qu'il nous en reste un peu, car sinon, avec ma sœur, on aurait eu du mal à s'en remettre », raconte celle qui a perdu une centaine d'animaux en une semaine.
À toutes ces peines cumulées qui ont fait craindre à certains de nos interlocuteurs des suicides d’éleveurs, s’en est ensuite ajoutée une autre, moins attendue. Celle rencontrée avec le seul service d’équarrissage du département, Atemax, chargé de venir récupérer les dépouilles.
Elle raconte : « entre le moment où on les a déclarés et le moment où le camion est venu les chercher, il s’écoulait environ cinq jours entre chaque passage. Donc, derrière la bergerie, on avait un tas de cadavres. À un moment, il y avait 40 brebis mortes. Et cette maladie semble accélérer la décomposition des corps. En deux ou trois jours, les bêtes étaient presque liquides. C’était vraiment affreux, sans compter les mouches, les asticots… On avait un vrai charnier derrière la bergerie. »
Des scènes macabres auxquelles ne se sont pas habitués les éleveurs que Pyrénées FM a rencontrés. Dans le Vallespir, tous ceux avec qui nous avons échangé expliquent avoir rencontré des difficultés avec le service pendant la crise, mais ils ne sont pas assez nombreux pour en faire une généralité. Reste que ces scènes macabres ont bel et bien existé et se sont parfois répétées. Orphée Chrysostome en a fait les frais à deux reprises, avec des agents d’Atemax certes sympathiques et compatissants vis-à-vis de la détresse de leurs clients, mais qui ont par mégarde ajouté des traumatismes à une situation déjà difficile.
« Ils ont essayé de ramasser le maximum qu'ils ont pu. Mais après, ils n'ont pas pu ramasser les petits morceaux d'os qui restaient, les morceaux de peau... On a essayé de faire comme on a pu, mais c'était... c'était pas beau à voir. Et là, travailler dans la bergerie avec les... avec 40 brebis mortes derrière, c'était affreux. L'odeur était insupportable. On avait les brebis enfermées dans la bergerie, notamment pour pouvoir les surveiller de près. C'était vraiment très, très dur à vivre », raconte Orphée Chrysostome, éleveuse mixte.
Jérôme Verges est moins tendre vis-à-vis de l’équarrisseur, à qui il reproche un manque de réactivité dans cette période de crise, d’autant que la réglementation sanitaire l’oblige à faire appel au service.
« Au bout de cinq ou six jours, il y a des vers partout, ça pue. Ils m'ont laissé des épaules, des oreilles, c’est pourri après cinq jours. C'est tout pourri, vraiment tout pourri. Il y avait une odeur insupportable. On passe tous les jours devant ces restes car on ne peut pas les déplacer à l'autre bout de l'exploitation ; il faut que ce soit accessible (aux camions-bennes du service d’équarrissage, ndlr.) pour qu'ils puissent venir les chercher. Franchement, l’équarrissage, c’est dur. Mais c'est leur mode opératoire. Je comprends qu’on ne puisse pas avoir une bête morte et qu’un service l’emporte du jour au lendemain. Cependant, je pense qu’en période de crise, ils auraient pu mesurer l'importance de la situation et envisager des rotations plus rapides. »
Une demande qui a d’ailleurs été formulée par le syndicat agricole du Vallespir auprès de l’entreprise privée. Le signe que ces mauvaises expériences ont été constatées avec d’autres éleveurs du territoire. D’après le président du syndicat, l’entreprise a partiellement répondu à cette demande, avec des rotations plus fréquentes, mais pas au niveau de leurs attentes.
« Il y avait des problèmes de logistique, surtout avec la forte demande en cette période de pandémie de FCO. La situation était compliquée, avec beaucoup de bêtes à ramasser. Les équarrisseurs étaient débordés, et parfois, quand ils arrivaient le matin, il y avait déjà des vautours sur les carcasses, qui étaient presque entièrement dévorées en quelques minutes. Cela compliquait encore plus le ramassage. [...] Pendant le pic de mortalité, cela a été très compliqué », regrette Thomas Ribes.
Atemax, service d’équarrissage qui opère dans les Pyrénées-Orientales et dans une soixantaine de départements de la métropole, a accepté de répondre à nos questions. Une interview où toutes ces problématiques ont été abordées, à découvrir dès maintenant.
Écrit par: Melvin Gardet
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