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Ariège. Élections à la chambre d’agriculture : quel modèle s’imposera ? Les positions des trois candidats

today22 janvier 2025 à 19h07

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Les élections de la chambre d’agriculture de l’Ariège se clôtureront ce 31 janvier. Pour faire valoir leurs positions, les candidats ont participé à un débat à l’antenne de Pyrénées FM le lundi 20 janvier. Parmi les invités, Hervé Peloffi (FDSEA), Philippe Lacube (président sortant), et David Eychenne (Confédération Paysanne). Qui prendra les rênes de la chambre d’agriculture pour les six prochaines années ? Réponse à partir du 6 février.

Les trois candidats pour la chambre d’agriculture d’Ariège dans le studio de Pyrénées FM. Crédits : Lucie Chollet / Pyrénées FM

Pour le monde agricole, ce début d’année 2025 est marqué par l’élection de la chambre d’agriculture. Les votes se déroulent du 15 au 31 janvier. Parmi les listes candidates, la Confédération Paysanne de l’Ariège est menée par David Eychenne ; « Ensemble pour une agriculture ariégeoise viable et durable » de la FDSEA* et des Jeunes agriculteurs est conduite par Hervé Peloffi. Enfin, la liste « Libres de cultiver notre avenir », n’étant officiellement affiliée à aucun syndicat, est entraînée par le président sortant Philippe Lacube. Les résultats de cette élection, réservée aux agriculteurs, seront connus le 6 février. D’ici là, la campagne court toujours…

Une dissidence au sein de la FNSEA

Cette élection s’annonce tendue au vu des derniers rebondissements qui entourent la primaire de la FDSEA. Depuis juin, c’est la douche froide pour le syndicat actuellement en place. Après avoir annoncé qu’il ne briguerait pas un deuxième mandat, Philippe Lacube décide finalement de se présenter avec une liste indépendante baptisée “Libres de cultiver notre avenir.”

Dans son propre camp, ce choix a été perçu comme un acte de dissidence par Hervé Peloffi. En effet, le candidat du FNSEA et des Jeunes Agriculteurs pointe du doigt l’importance qu’ont eu ces deux syndicats au cours du mandat de Philippe Lacube, dont il compte aujourd’hui bénéficier, mais sur une liste indépendante. D’autre part, la Confédération Paysanne désapprouve également ce revirement de situation. “On se retrouve avec deux listes du même syndicat majoritaire. Philippe a beau s’en défendre, finalement, s’il est élu, il sera quand même soutenu par la FDSEA”, s’insurge David Eychenne (Confédération Paysanne). Un acte que Philippe Lacube attribue à un parcours de circonstance :

“L’équipe avec qui j’ai travaillé pendant 6 ans m’a demandé de revenir sur ma décision. Mais au moment où les syndicats majoritaires ont décidé de faire une primaire, je n’y étais pas invité. Être aussi peu considéré, ça a quand même été difficile à avaler.”

Philippe Lacube, candidat pour la liste « Libres de cultiver notre avenir », n’étant officiellement affilié à aucun syndicat.

En réponse, Philippe Lacube, président sortant, a donc décidé de présenter sa propre liste à la chambre d’agriculture d’Ariège. Après s’être longuement exprimés aux micros de Pyrénées FM sur ce revirement de situation qui a fait grand bruit dans le monde agricole Ariègeois, les différents candidats se sont penchés plus précisément sur les sujets qui marqueront les six prochaines années, sur fond de crise agricole.

Moins de papiers, plus d’actions

À commencer par la Politique Agricole Commune (PAC). Cette aide financière européenne vise à augmenter les rendements agricoles tout en maintenant les revenus des exploitants et en assurant des prix raisonnables aux consommateurs. Bien que la France soit le pays d’Europe bénéficiant le plus des aides de la PAC, les débats se cristallisent autour de la pertinence de son mode de fonctionnement. Certains dénoncent une exigence administrative trop contraignante pour les plus petits agriculteurs ou encore une incitation à l’agriculture productiviste, néfaste pour l’environnement.

Pour David Eychenne de la Confédération Paysanne, le problème provient surtout du mode de répartition de la PAC qui dépend du nombre d’hectares d’un exploitant, et cela sans plafonnement : “il y a beaucoup de disparités entre un petit éleveur et un agriculteur qui a des surfaces importantes.” Selon lui, la PAC devrait également établir un cadre plus strict pour faire face à la concurrence venant d’autres pays.

“Il faudrait mettre en place des prix minimums d’entrée, c’est-à-dire que les produits ne peuvent entrer sur le territoire français (qu’à partir d’un certain prix, ndlr.), y compris des produits européens.” 

David EYCHENNE, tête de liste pour la confédération paysanne de l’ariège

De son côté, Hervé Peloffi de la FDSEA assure que la problématique principale provient du fait que l’accession à la PAC est trop contraignante : “malheureusement, on est dans un système où on demande plus aux gens de faire des rapports que de l’action.” En réaction, Philippe Lacube s’empresse alors d’appuyer les efforts qu’aurait réalisé la chambre d’agriculture durant son mandat : « on a été là pour accompagner les agriculteurs dans la rédaction de leurs dossiers et pour faire des actions de lobbying auprès de la PAC, parce qu’on en a besoin dans cette période qui est particulièrement difficile pour toute l’agriculture française.”

Aussi importante, l’eau est un sujet de débat majeur en Ariège, comme dans de nombreux territoires du pays.

Crise de l’eau

Les agriculteurs ariégeois sont particulièrement préoccupés par les problématiques qui entourent l’eau, essentielle à l’agriculture comme le rappelle David Eychenne : “contrairement à ce que dit une petite musique qui monte, on n’est pas contre l’irrigation, il n’y a pas d’agriculture sans eau. Il faut adapter les cultures en fonction de l’eau disponible, et c’est ce que font déjà les agriculteurs depuis quelques années. Et il faut les accompagner dans ce sens. » En revanche, le représentant de la Confédération Paysanne estime que toutes les solutions ne sont pas crédibles : « concernant les bassines, ça n’a rien à voir, aller pomper de l’eau souterraine, ça ne nous paraît pas raisonnable.”

Hervé Pellofi, représentant de la FDSEA, se veut moins alarmiste concernant le manque d’eau en Ariège : “on a la chance d’avoir des montagnes qui arrêtent les nuages ainsi que le lac de Montbel.” Sur ce point, Philippe Lacube, président sortant, semble se ranger à l’avis d’Hervé Pellofi : « on a une immense chance en Ariège, c’est d’avoir cinq barrages en montagne, donc on a les ressources nécessaires. Mais le problème est qu’aujourd’hui, cette eau ne bénéficie pas à l’Ariège. On ne peut pas l’utiliser car c’est la Gironde et Toulouse qui en bénéficient.”

Toulouse, justement, a été le théâtre d’une action coup de poing de la Coordination Rural du Gers le week-end dernier. Le syndicat, souvent apparenté à droite, s’en est pris à la devanture des locaux de l’Office Français de la Biodiversité (OFB) pour exprimer son mécontentement au sujet de cet organisme chargé notamment de contrôler les exploitations agricoles.

Des tensions autour de l’OFB

Le rôle de l’Office Français de la Biodiversité dans la régulation des pratiques agricoles a donc naturellement alimenté le débat. Chargé de protéger la biodiversité, l’OFB provoque des tensions chez les agriculteurs.

Hervé Peloffi, représentant de la FDSEA, juge les contrôles excessifs. Selon lui, la profession agricole est déjà soumise à une réglementation particulièrement stricte.

“J’ai un petit peu de mal à comprendre comment on arrive à autant de contrôles. Franchement, il faut arrêter. On est surveillés de partout. Je ne sais pas s’il y a une autre profession qui est aussi surveillée que l’agriculture.”

HERVÉ PELOFFI, tête de liste FDSEA/JA en ariège

Pour David Eychenne, ces contrôles devraient être menés avec davantage de discernement. Il plaide pour une simplification de certaines normes, mais souligne aussi leurs avantages : « certaines nous protègent par rapport aux autres agriculteurs européens. D’autres nous permettent aussi de conquérir des marchés.” Malgré ces critiques, les données témoignent de l’efficacité des contrôles menés par l’OFB. En 2022, sur 200 inspections réalisées en Ariège, quatre procès-verbaux assortis d’amendes ont été dressés. Ces chiffres soulignent la conformité des exploitations agricoles, même sous la contrainte d’un cadre réglementaire strict. 

Philippe Lacube n’est pas du même avis et fustige l’implication de l’OFB : “ce n’est pas possible, cette histoire c’est un vrai souci. Combien de péripéties on a vécues sur des contrôles.” Le président sortant évoque notamment le problème des pesticides phytosanitaires, très utilisés par les exploitants, et fortement ciblés par l’OFB pour des questions environnementales.

C’est peu dire que le débat reste vif sur l’équilibre à trouver entre préservation de l’environnement et nécessité économique pour les agriculteurs, mais aussi sur l’ours, et tant d’autres sujets qui ont été abordés au cours de cette émission spéciale. Le débat est désormais disponible en podcast en intégralité.

*Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles.

Elina Lacoste et Florian Salvat

Écrit par: Melvin Gardet

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