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À Ax-les-Thermes et à Savignac-les-Ormeaux, le Miam d’Ici a fait le choix des produits locaux : « ça peut dérouter, mais c’est assumé »

today11 décembre 2024 à 15h23

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Depuis quatre ans, un snack spécialisé dans les burgers à base de produits locaux a ouvert ses portes à Savignac-les-Ormeaux, en Ariège. Depuis peu, un autre établissement a ouvert à Ax-les-Thermes, en plein cœur de la station. Rencontre avec Audrey Navarro, la gérante de ces établissements.

Crédits : Miam d’Ici

C’est une aventure entrepreneuriale qui a débuté en décembre 2020 dans un chalet en bois installé sur le parking de l’Intermarché de Savignac-les-Ormeaux, le long de la nationale 20, en Ariège. L’été, au snack « Le Miam d’Ici », c’est salade, tapas, et glaces ariégeoises. L’hiver, c’est soupe, vin chaud, crêpes et gaufres. Une carte élaborée avec des produits locaux qui est renouvelée tous les six mois, c’est la promesse de l’établissement.

Pour autant, en toute saison, la spécialité du commerce, c’est le burger. Les habitués de ce supermarché le savent bien, les burgers de Miam d’Ici sont des best-sellers à privilégier. D’autant qu’ils sont servis avec la joie de vivre d’Audrey Navarro, la gérante, et de son compagnon. Un élément qui fait sans doute parti intégrante du succès de ce point de restauration, complété depuis le mois de mai 2024 par un nouveau local, situé au pied de l’Eglise Saint-Vincent d’Ax-les-Thermes.

« Tous les produits, la viande, les pommes de terre, la charcuterie, les fromages, les légumes en saison, viennent des producteurs d’Ariège principalement. J’utilise aussi les produits de saison des commerçants d’Ax-les-Thermes », précise tout de suite Audrey.

Le fait maison, les produits locaux, pour elle et son mari qui l’a rejoint dans l’aventure récemment, c’est le choix de la responsabilité. Ses plus de vingt années d’expérience dans la restauration, au cours desquelles l’a marqué une expérience de huit années dans un snack situé aux abords des pistes de ski de Haute-Savoie, ont modelé sa façon d’envisager son projet de ‘junk food.’

"Je travaillais à La Grande Ourse au Praz de Lys. J'ai adoré. Au début, il y avait pas mal de produits industriels. Au fur et à mesure, j'ai réussi à persuader ma patronne de faire plus de bons produits, même si ça coûtait un peu plus cher. Au fur et à mesure du temps, j'ai réussi à faire mes propres produits, comme les sauces. Je prenais du bon pain, je faisais attention à quel genre de steak haché je prenais, tout ce qui était charcuterie et fromages aussi. Du coup, ça a vraiment commencé à développer ma créativité."

Pendant la pandémie de Covid-19, elle et son mari décident de se lancer dans leur propre aventure entrepreneuriale. Pas la meilleure période, elle en convient. Alors il a fallu faire un choix, celui de la sécurité : Monsieur conserve son contrat à durée indéterminée pour assurer une stabilité financière au couple, Madame tiendra le snack. Avec au départ quelques produits industriels pour lancer l’activité. Très vite, les produits locaux prennent toute leur part, et Audrey Navarro construit son réseau de producteurs.

Valoriser les petits producteurs

Crédits : Miam d’ici

Ils avaient entendu parler de moi, du snack, des burgers, et du fait que c’était vraiment bon. Au fil du temps, j’ai réussi à me créer un beau réseau. J’échange avec eux, parfois j’utilise leurs produits, parfois d’autres, et je teste leurs nouvelles créations. Je fais aussi des suggestions du jour de temps en temps. Cela permet de voir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.

Une démarche qu’elle souhaite davantage valoriser, avec une refonte de son site internet (en cours de préparation) pour y inclure une liste détaillée de tous les producteurs avec lesquels elle collabore. Le tout pour plus de transparence et pour promouvoir ses fournisseurs. Cela fait parti d’une envie plus générale de partager une relation de confiance avec les agriculteurs avec lesquels elle travaille.

C’est déjà le cas avec le Festival des Saveurs. Comme mes produits viennent de producteurs locaux, je participe à cet événement. Ensuite, j’aimerais aussi collaborer avec des associations, des événements musicaux ou autres, pour dire : ‘Coucou, je fais des burgers avec des produits de producteurs locaux, et vous pouvez retrouver ces producteurs à tel ou tel endroit.’

Après l’enregistrement de l’interview, la commerçante fait même parvenir un email à Pyrénées FM pour re-préciser son engagement : sa démarche est sincère et elle ne se repose pas sur une tendance de consommation. Car outre les bienfaits pour la santé, Audrey Navarro défend un modèle agricole plus respectueux des bêtes.

Faire le choix de la qualité

Crédits : Miam d’Ici
C’est avant tout pour soutenir les fermiers et les agriculteurs, afin qu’ils soient rémunérés à la juste valeur de leur travail. Mais c’est aussi parce que je choisis spécifiquement le mode d’élevage des animaux. C’est quelque chose qui est très important pour moi. Ce n’est pas parce qu’on élève des animaux pour les consommer qu’on ne doit pas les respecter en tant qu’êtres vivants à part entière.

Signe que cette thématique lui tient à coeur, et alors que cet automne est une fois encore marqué par de nombreuses manifestations des agriculteurs, notamment dans les Pyrénées, Audrey Navarro en appelle même à la responsabilité de son secteur.

Il est grand temps que les acteurs du monde de la restauration montrent l’exemple et s’investissent davantage dans le choix de la viande et du mode d’élevage des animaux. Ce ne devrait plus être les prix qui passent en premier, mais l’éthique et l’humain. Nous avons un grand pouvoir : celui de choisir ce que nous consommons. Arrêtons de nous laisser dicter nos choix par les grandes entreprises et choisissons ce qui est vraiment bon pour nous.

Audrey Navarro, gérante des snacks « le miam d’ici » en haute-ariège

Son expérience est d’ailleurs riche d’anecdotes qui disent quelque chose des différences qui peuvent exister entre ville et campagne dans les habitudes de consommation. L’entrepreneuse dit avoir remarqué que la clientèle de son premier établissement est différente de celle du second, situé à seulement deux kilomètres.

(re)découvrir des saveurs

Crédits : Miam d’ici

D’après elle, sa clientèle du parking d’Intermarché est composée de locaux qui reconnaissent sans trop de difficultés les produits artisanaux et faits maison. La clientèle d’Ax-les-Thermes, plus touristique et issue des grandes villes, serait globalement moins habituée au « manger mieux » défendu par Santé Publique France.

« J’ai beaucoup de touristes ou de gens de passage qui vont au Pas de la Case. Cela m’a d’ailleurs beaucoup surprise. En termes de goût, ils découvrent des saveurs qu’ils ne connaissent pas forcément », explique-t-elle, tout en précisant que leur surprise débouche le plus souvent sur des sentiments satisfaisants. C’est parfois plus compliqué avec les enfants.

Par exemple, j’utilise un ketchup artisanal, et les enfants, habitués au ketchup industriel du supermarché, trouvent qu’il n’a pas le même goût. Cela peut dérouter, mais c’est un choix assumé.

Audrey navarro, gérante des snacks le miam d’ici

Ainsi, les boissons et toutes les matières premières sont, dit-elle, issues d’un savoir-faire local. Moins sucrées et moins relevées par les additifs, les saveurs peuvent paraître plus fades à certains. « Un petit temps d’adaptation est parfois nécessaire », commente-t-elle avec bienveillance face à un constat qui ouvre tout de même une piste de réflexion sur notre dépendance à l’industrie agroalimentaire, et aux produits ultra-transformés.

Cet engagement n’est d’ailleurs pas une excuse toute trouvée pour balayer la critique.

Dépasser la frontière du numérique

Les plaintes de ses clients, Audrey Navarro est prête à les accueillir avec attention. Elle leur demande même de les lui adresser directement. Sur la page Facebook de son enseigne, la publication ci-dessous est même la première que l’on peut apercevoir.

Cliquez ici si vous ne voyez pas apparaître la publication Facebook.

« Merci de ne pas mettre d’avis positif ou négatif : je préfère à l’ancienne !! Venez me dire ce que vous avez aimé ou ce que vous n’avez pas aimé … que je puisse m’améliorer ! Car c’est le but !!! » – Extrait de la publication.

Interrogée par Pyrénées FM à ce sujet, Audrey Navarro s’explique quant à ce choix plus rare qu’il n’y paraît.

Ce que je veux absolument, c’est m’améliorer. Je pense qu’on ne peut pas vraiment progresser en se contentant de critiques négatives sur les réseaux. Par contre, quand c’est en face à face, on peut écouter, échanger et partager.

Audrey Navarro, le miam d’ici

C’est donc par le dialogue que la gérante de Miam d’Ici préfère communiquer avec ses clients. D’autant que déception ou pas, Audrey Navarro souhaite qu’ils repartent avec le sourire.

"C’est ça qui compte. Quand ils arrivent, souvent pressés ou stressés, peut-être que mes prix sont un peu plus élevés que ceux des grandes enseignes internationales, mais je veux leur offrir une expérience différente. C’est vraiment ça mon objectif : qu’ils apprécient pleinement le moment, même si ce n’est qu’un quart d’heure, même s’ils choisissent de prendre à emporter", nous explique la gérante avec un brin d'enthousiasme.

Cet objectif semble en tout cas remplis. De quoi permettre à Audrey Navarro de se concentrer sur un autre défi qu’elle a en tête en ce moment.

Faire de Miam d’Ici un incontournable d’Ax

Crédits : Miam d’ici

Elle et son compagnon ont effectivement la volonté de se séparer de leur chalet en bois de Savignac-les-Ormeaux pour se concentrer sur un point de vente unique. Car actuellement, le mari d’Audrey gère le snack de Savignac, tandis qu’elle s’occupe de celui d’Ax. « Du coup, on ne se voit pas beaucoup », confie-t-elle à Pyrénées FM un brin gênée.

Un manque de temps pour leur couple qui a mené à de grandes ambitions pour leur activité professionnelle.

L’idée, c’est de se réunir pour créer une véritable force commune et faire du snack d’Ax-les-Thermes un incontournable de la street food, non seulement dans la ville, mais aussi sur la route du Pas-de-la-Case, et dans toute l’Ariège.

Audrey Navarro, le miam d’ici

Pour ce faire, le couple de restaurateurs compte sans surprise s’appuyer sur son réseau de partenaires. A terme, le snack d’Ax-les-Thermes pourrait être une belle vitrine pour les producteurs du département. « Sans eux, on ne pourrait pas manger. C’est eux que j’aimerais vraiment valoriser », conclut-elle.

Écrit par: Melvin Gardet

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