Douzième jour d’audience, ce jeudi 9 octobre, dans le procès de Cédric Jubillar, jugé pour le meurtre de son épouse Delphine, disparue en décembre 2020. À la barre, deux anciennes compagnes de l’accusé : Séverine L. et Jennifer C.. Leurs témoignages, attendus, ont été marqués par plusieurs contradictions.
Ce matin, c’est Séverine L., l’une des ex-petites amies de Cédric Jubillar, qui a pris la parole. Elle a partagé la vie de l’accusé pendant deux mois, au moment même où celui-ci venait d’être mis en examen et placé en garde à vue. Aujourd’hui encore, elle se dit convaincue de son innocence et demeure l’une des rares à continuer de le défendre.
« J’étais curieuse »
« Rien. Je ne regrette pas du tout ma relation avec Cédric », répond-elle d’abord, laconique, à la présidente de la cour, Hélène Ratinaud, qui l’invite à s’exprimer librement.
Interrogée sur les débuts de leur relation, Séverine explique avoir pris contact avec Cédric Jubillar alors qu’elle participait aux battues organisées pour retrouver Delphine. « J’avais trouvé un pull, raconte-t-elle. Je l’ai contacté pour lui montrer, il m’a dit qu’il ne le connaissait pas. »
» Il ne cherchait pas beaucoup sa femme »
La première rencontre remonte au 10 avril, lors des recherches. Rapidement, une relation se noue. « J’étais curieuse, confie-t-elle. Je me suis dit : pourquoi pas me rapprocher de lui pour en savoir un peu plus ? »
Pendant ces deux mois de vie commune, Séverine décrit un homme « très attentionné avec ses enfants ». Elle reconnaît toutefois avoir eu « parfois des doutes » : « Il ne cherchait pas beaucoup sa femme, mais je ne me suis jamais dit qu’il avait fait du mal à Delphine. »
« Vous disiez que Louis avait peur de son père »
Une affirmation qui fait bondir Me Chmani, avocate des enfants Jubillar. Lecture du dossier à l’appui, elle lui rappelle des déclarations antérieures bien différentes :
« Vous disiez que Louis avait peur de son père, que vous étiez partie plusieurs fois à cause de sa violence. Vous ajoutiez qu’il tirait les oreilles de son fils, lui mettait des claques que, je cite, “vous n’aimeriez pas recevoir”, qu’il le mettait à genoux et que l’enfant était terrorisé. »
“Allez, dis-nous où tu l’as cachée »
Face à ces rappels, Séverine L. reconnaît : « Oui, c’est vrai. » Enfin, interrogée sur d’éventuels aveux de l’accusé, elle se souvient d’une phrase prononcée sur le ton de la plaisanterie :
« Un jour, je lui ai dit : “Allez, dis-nous où tu l’as cachée, ça nous évitera de la chercher.” Et il m’a répondu en rigolant : “Mais dans la ferme qui a brûlé, ça fait dix fois que je te le dis.” »
« J’étais sûre qu’il n’avait rien fait »
À la barre, Séverine L. revient également sur la fin de sa relation avec Cédric Jubillar. Elle explique y avoir mis un terme au moment de sa garde à vue, lorsqu’elle-même a été entendue par les gendarmes. « Vous avez pourtant continué à entretenir une relation avec lui ? », lui rappelle la présidente Hélène Ratinaud. « Oui, mais uniquement par courrier », répond la témoin.
Interrogée sur ses motivations, Séverine L. se défend : « J’étais sûre qu’il n’avait rien fait. Je m’étais attachée à lui », confie-t-elle, reconnaissant avoir voulu maintenir un lien avec l’accusé.
Au fil de l’audience, de nouveaux éléments viennent éclairer leur relation. La témoin admet avoir entretenu deux pieds de cannabis destinés à sa propre consommation et à celle de Cédric Jubillar. Plus surprenant encore, elle évoque la visite d’un certain Marc Aurèle, surnommé Marco, ancien co-détenu de l’accusé. Selon elle, cet homme l’aurait contactée à la demande de Cédric Jubillar.
« il aurait prétendu vouloir aider Cédric à “masquer son crime”
« Il m’a appelée, il voulait me remettre un courrier, et me voir. Je l’ai vu quatre fois », raconte-t-elle. Lors de ces rencontres, l’homme lui aurait confié une histoire singulière : « Il m’a dit que Cédric lui avait demandé, pendant la promenade en prison, de déplacer le corps et de mettre des preuves pour faire accuser l’amant de Delphine. Il devait venir me voir pour que je lui montre l’endroit où elle serait enterrée. Il m’a dit : “C’est un endroit qui a brûlé.” Et là, je lui ai répondu : “Oh putain, il parle de cette ferme ! – biensur je n’y croyais pas , je lui ai dit Cédric se fout de toi! »
Le récit de Marco aurait pris une tournure encore plus fantasque : il aurait prétendu vouloir aider Cédric à “masquer son crime” en plaçant des indices et de l’ADN de l’amant de Delphine. « Je lui ai donc montré des photos de l’amant », poursuit-elle.
Mais la témoin relativise aussitôt : « C’était grotesque. Ce Marco me racontait des trucs abracadabrants, comme le week-end dernier, où il aurait braqué le cousin de Pablo Escobar, ou encore des histoires sur les enchères de France 2… Bref, c’était du grand n’importe quoi. »
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