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Pyrénées-Orientales. Le sort de la déviation de Marquixanes bientôt scellé ?

today25 novembre 2024 à 6h30

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La mise en œuvre du projet de déviation (RD66) sur la commune de Marquixanes sera décidée dans les prochaines semaines. Les résultats de la dernière enquête publique sur le sujet, qui ne devraient pas tarder à être révélés, seront pris en compte. Alors que l’avenir de ce projet de longue date reste flou, Pyrénées FM fait le point sur les arguments mis en avant par les soutiens et les opposants au projet.

Marquixanes, photo de Fabricio Cardenas, CC BY-SA 4.0

Depuis le premier janvier 2024, l’État a confié au conseil départemental des Pyrénées-Orientales la gestion de la route départementale 66 (ex RN116) et, par conséquent, tous les projets d’une valeur totale de 100 millions d’euros qui concernent l’axe qui relie la plaine du Roussillon aux Pyrénées Catalanes. Dans ces projets, il y a la déviation de Marquixanes par le nord, qui fait débat depuis de nombreuses années.

Avec un budget prévisionnel de 32 millions d’euros, le projet a pour but d’aménager une rocade à 1×2 voies sur 1,7 km au nord de Marquixanes, le long du fleuve de la Têt, pour diminuer la circulation sur la RD66 qui traverse le bourg. Le Conseil départemental évalue effectivement à 15 000 le nombre de véhicules qui traversent le village de moins de 600 habitants chaque jour.

Avec cette déviation, le Conseil Départemental a donc pour objectif de sécuriser la traversée du bourg et de fluidifier la circulation. Mais le projet est critiqué par certains pour ses bénéfices jugés faibles et pour son impact environnemental.

90 espèces protégées

Cette déviation risque effectivement d’impacter la faune et la flore locale. C’est en tout cas le message que souhaite faire passer le groupe Les Écologistes – Pays catalans.

Interrogé par Pyrénées FM, le candidat aux dernières législatives David Berrué pointe du doigt « l’artificialisation des sols, ainsi que des berges de la rivière Têt. » Une action qui va bouleverser l’écosystème pour 90 espèces protégées. Pour l’écologiste, on est dans un projet qui va abîmer « son environnement immédiat pour un gain de temps minime d’à peine 30 secondes. »

Le projet de déviation. Crédits : Préfecture d’Occitanie

Du côté du département des Pyrénées-Orientales, on est plus mesuré. Jean Roque, le vice-président du conseil départemental en charge des mobilités, précise que le gain de temps pourrait se faire ressentir dans une dizaine d’années.

« C’est un projet sur le long terme, et pour ce qui est des espèces protégées, il existe des mesures compensatoires pour recréer des environnements spécifiques dans d’autres territoires. »

Ce dernier argument n’est pas contesté par David Bérué, mais il estime que ces solutions sont insuffisantes et ne permettent pas de compenser l’impact du projet sur la biodiversité.

Du côté de la municipalité de Marquixanes, d’autres problématiques sont avancées, et justifient la mise en œuvre de ce projet de déviation.

Prévenir un drame

Le maire Jacques Vanelle ne le fait pas pour un potentiel gain de temps, il dit penser avant tout à la sécurité des habitants de Marquixanes : « Le but, c’est que les 17 000 véhicules qui traversent le village chaque jour ne le fassent plus. On compte parmi eux des camions imposants, il y a des destructions matérielles comme des poteaux, j’ai peur qu’un jour ce soit quelqu’un », précise le maire à Pyrénées FM.

L’élu estime par ailleurs qu’il faut vivre à Marquixanes pour bien comprendre les problématiques qui poussent à être favorable à cette déviation. Il regrette d’ailleurs que les membres des groupes écologistes s’en mêlent, et croit à une exagération de leur part. « On parle de 90 espèces protégées, on découvre tout d’un coup que l’on a une réserve à Marquixanes, on présente le projet comme un monstre, ce n’est pas non plus une autoroute », indique-t-il, non sans ironie.

Sans surprise, Jacques Vanelle regrette donc que le projet soit débattu depuis une quarantaine d’années. D’autant que les acteurs politiques ne sont pas les seuls à avoir un avis sur le projet.

Impact économique

La déviation divise également au sein des professions. Le passage important de véhicule sur cet axe fait le bonheur de certains commerces, comme le domaine MAS LLOSSANES : « Nous avons beaucoup d’arrêts spontanés, ils représentent environ 40% de notre clientèle », nous explique Solenn Genot, co-gérante. Si elle ne se dit pas farouchement opposée au projet, elle questionne son coût, et ce alors que les caisses de l’Etat et des collectivités se resserrent, au même titre que celles du marché immobilier…

Car à Marquixanes, aux abords de la départementale 66, plusieurs maisons arborent des panneaux « maison à vendre. »

Instinctivement nous vient l’idée que la circulation fait probablement fuir les habitants. Une hypothèse en partie confirmée par Élodie Gerenton, agent immobilier à Marquixanes :

« On est sur des mobilités, sur un village vieillissant, donc les gens partent. Par contre, il est vrai qu’on a dû mal à les vendre à cause de l’axe. »

À titre personnel, elle confie à Pyrénées FM qu’elle possède une maison en vente aux abords de la RD66. Elle dit avoir été contrainte de la mettre en location au vu des difficultés qu’elle a rencontré pour la vendre. Une situation qui a un impact direct sur le prix au mètre carré : « La même maison mais pas sur le même axe peut valoir au moins 20% de plus, parce que la nuisance sonore est là, ainsi que la pollution. Des personnes ont appelé pour visiter ma maison. Dès qu’ils ont appris qu’elle était proche de la route, ils ont annulé », explique-t-elle.

Les résultats de l’enquête publique, qui s’est terminée le 23 octobre, seront probablement nourris de ces quelques arguments. L’avenir du projet sera ensuite décidé en tenant compte des avis collectés.


Florian Cibot

Écrit par: Melvin Gardet

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